Et si s’intéresser aux raisons pour lesquelles les étudiants et les étudiantes ne trichent pas permettait de concevoir de meilleures politiques institutionnelles en matière d’intégrité ? C’est ce que suggère une équipe australienne dans une récente étude parue dans l’International Journal for Educational Integrity.

Dans leur article Why students do not engage in contract cheating: a closer look, Kiata Rundle (Université Murdoch), Guy J. Curtis (Université d’Australie-Occidentale) et Joseph Clare (Université d’Australie-Occidentale) s’intéressent à la « tricherie contractuelle ». L’équipe de recherche approfondit ainsi une étude qu’elle a réalisé en 2019 en examinant les raisons et les traits de personnalité qui éloignent les étudiants et les étudiantes de la tricherie.

Qu’est-ce que la tricherie contractuelle ?

L’équipe de recherche définit la tricherie contractuelle comme le fait de payer une tierce personne – que ce soit un membre de la famille, une ou un ami ou un service en ligne – pour réaliser à sa place un travail, un examen, ou toute autre activité d’évaluation. Des recherches ont estimé qu’entre 3 et 11 % des étudiants et étudiantes s’adonneraient à cette forme de tricherie (Rundle et al., 2023).

Pourquoi ne pas tricher ?

Pour mieux comprendre la motivation à rester intègre, Rundle, Curtis et Clare ont conçu un questionnaire listant 34 raisons pour lesquelles ne pas tricher. Les étudiants et étudiantes devaient noter à quel point ces raisons expliquaient leur comportement. Le questionnaire a été rempli par 403 étudiants et étudiantes déclarant ne jamais s’être engagés dans la tricherie contractuelle.

L’équipe de recherche a identifié six principales motivations à la non-tricherie. Les trois premières correspondent à des justifications d’ordre moral tandis que les trois dernières relèvent davantage des obstacles à la tricherie :

  1. La motivation pour l’apprentissage
  2. Les normes et la morale
  3. L’environnement académique
  4. La peur de la détection et de la punition
  5. Le sentiment d’auto-efficacité et de confiance
  6. Le manque d’opportunités

Les raisons d’ordre moral sont celles qui sont le plus évoquées pour expliquer le comportement intègre.

L’influence de la personnalité sur l’intégrité

L’équipe de recherche a aussi évalué, à l’aide de différentes échelles (notamment une échelle mesurant les traits de machiavélisme, de narcissisme et de psychopathie), des facteurs liés à la personnalité et leur influence sur les raisons de ne pas tricher. Il en ressort que ces dernières peuvent varier selon certaines caractéristiques psychologiques.

Ainsi, chez les personnes dont le besoin d’autonomie est satisfait par les activités académiques, les principales raisons pour ne pas tricher seraient d’ordre moral. Pour les personnes décrites comme étant plus calculatrices, la peur que la tricherie soit repérée et sanctionnée est davantage évoquée. La motivation à apprendre apparait comme raison principale chez les étudiants et étudiantes qui ont une meilleure maîtrise de soi et qui sont plus autonomes et persévérants.

Comment les établissements peuvent-ils favoriser l’intégrité académique ?

Cette étude montre que les étudiants et les étudiantes font le choix de ne pas tricher pour différentes raisons. L’équipe de recherche fait donc valoir que les mesures de prévention de la tricherie devraient varier pour refléter cette observation. En ce sens, elle suggère :

  • Que le personnel soit formé à la détection de la tricherie contractuelle et qu’il sanctionne les cas détectés. Cette mesure pourrait être efficace à l’égard des étudiants et étudiantes pour qui la principale raison pour ne pas tricher est la peur de la punition.
  • Que les établissements sensibilisent la population étudiante sur l’intégrité académique. Cette approche serait adaptée aux profils psychologiques des étudiants et étudiantes qui ne trichent pas pour des raisons morales.
  • Que les établissements veillent à ce qu’une certaine flexibilité soit offerte dans les modalités d’évaluation (par exemple, en accordant des délais lorsque les étudiants et les étudiantes vivent des difficultés personnelles). Cette flexibilité contribuerait à éviter la tricherie chez les étudiants et étudiantes rencontrant des obstacles dans leurs apprentissages.
  • Que les établissements offrent un enseignement de qualité et des services de soutien adaptés, ce qui pourrait contribuer à renforcer la détermination des étudiants et étudiantes qui choisissent de ne pas tricher par respect pour l’environnement académique.

Référence

Rundle, K., Curtis, G. J., et Clare, J. (2023). Why students do not engage in contract cheating : A closer look. International Journal for Educational Integrity, 19(1), 11. https://doi.org/10.1007/s40979-023-00132-5