Le plus récent numéro de la Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur porte sur l’accompagnement doctoral.

Ce numéro rassemble huit articles portant sur une variété de conceptions de l’accompagnement des étudiants et étudiantes au doctorat. Voici le résumé de trois de ces articles.


L’apport des groupes de rédaction académique

Catherine E. Déri (Université d’Ottawa), Cynthia Vincent (Université du Québec à Montréal) et Émilie Tremblay-Wragg (Université du Québec à Montréal) s’intéressent aux groupes de rédaction académique dans leur article L’accompagnement par les pairs au doctorat pour socialiser les femmes au métier de chercheuse.

Leur article présente les résultats d’une étude de cas sur un groupe Facebook créé par l’organisme Thèsez-vous qui a pour objectif de soutenir la rédaction universitaire. Les chercheuses ont mené des entrevues avec 23 femmes, un homme et une personne non binaire qui, pendant leurs études, ont participé à des cafés de rédaction académiques (CRA). Les questions portaient principalement sur les sources de socialisation au métier de chercheuse, le développement de compétences rédactionnelles et les apprentissages réalisés grâce aux groupes de rédaction (Déri, Vincent, Tremblay-Wagg, 2023, §29).

Les résultats montrent que la rédaction en groupe :

  • est appréciée par les femmes en raison des occasions d’échange entre doctorantes qu’elle permet (§33).
  • offre une occasion aux femmes de travailler hors de leur foyer. Ce faisant, elles peuvent surmonter les difficultés du travail à domicile, notamment la réalisation des tâches domestiques et l’affirmation de l’aspect prioritaire de leur travail (§34-37).
  • permet aux femmes de se soutenir et de discuter des enjeux liés à leur place dans la sphère académique (§41).
  • offre des occasions de collaboration académique telles que l’élaboration de communications, la rédaction d’articles ou encore la révision de textes (§47 à 50).

L’accompagnement offert par les nouveaux professeurs et professeures

Dans l’article De doctorants à directeurs de recherche : accompagnement reçu et dispensé, Claire Duchesne (Université d’Ottawa), Lucie Le Callonnec (Université d’Ottawa) et Nathalie Gagnon (Université du Québec à Rimouski) s’intéressent au type d’accompagnement reçu par de nouveaux professeurs et professeures durant leur parcours doctoral. Les trois chercheuses y examinent également l’accompagnement que ces personnes offrent désormais à leurs étudiants et étudiantes.

L’équipe de recherche a mené des entrevues avec ces 16 nouveaux membres du corps professoral. Leurs propos ont été catégorisés selon quatre types d’accompagnement – inspirées des travaux de Gatfield (2005) et de Lee (2008) – soit l’accompagnement orienté vers :

  • La thèse, où les interventions visent à assurer la maîtrise du champ d’expertise de l’étudiant ou de l’étudiante et à réaliser une thèse dans les délais fixés.
  • La socialisation aux métiers de la recherche, où les interventions encouragent la participation aux activités savantes en vue de développement d’une identité de chercheur ou de chercheuse.
  • La personne étudiante, où l’épanouissement personnel est visé; avec un souci de tenir compte de son état psychologique et de ses besoins personnels.
  • La personne directrice de recherche, où les interventions concernent principalement les contributions étudiantes aux travaux de la personne directrice.

Les chercheuses ont observé que les personnes interrogées s’inscrivent majoritairement – mais pas uniquement – dans le style d’accompagnement orienté vers la thèse.

En outre, débutant leur carrière, les personnes participantes semblent peu outillées pour offrir un accompagnement orienté vers la socialisation aux métiers de la recherche, vers la personne étudiante ou encore vers la personne directrice.

« Dans les faits, les nouveaux directeurs de recherche sont à peine plus expérimentés que les étudiants qu’ils dirigent et le souci d’enrichir l’expérience de leurs étudiants par leur contribution à des activités savantes et pédagogiques s’ajoute aux nombreux autres soucis qui sont inhérents à l’installation dans une nouvelle carrière. […] En somme, les participants à cette étude se sont montrés davantage centrés sur la thèse qui est à produire que sur l’étudiant qui doit cheminer, se socialiser et s’épanouir. »(Duchesne, Callonnec et Gagnon, 2023, §57)

Les chercheuses recommandent que des dispositifs de formation à l’accompagnement doctoral soient offerts aux nouveaux membres du corps professoral. Un jumelage pourrait être également réalisé avec des collègues plus expérimentés pour favoriser le partage d’expériences.


L’impact de la direction sur la poursuite des études doctorales

Deux chercheuses de l’Université de Sherbrooke, Constance Denis et Christelle Lison, interrogent le rôle de l’accompagnement dans l’abandon des études doctorales dans l’article L’abandon aux études doctorales : Un problème de direction ?

Les chercheuses ont mené une étude auprès de 20 personnes doctorantes et 20 personnes directrices de recherche au sujet de leurs expériences d’encadrement de la recherche. En plus de confirmer le rôle de l’encadrement pour favoriser la persévérance, l’analyse des propos recueillis a fait ressortir trois pratiques d’encadrement particulièrement efficace : « 1) un recrutement guidé, dès le début; 2) une communication transparente et honnête; 3) une insertion professionnelle réfléchie tout au long du parcours. » (Denis et Lison, 2023, §16)

Concernant le recrutement, les chercheuses expliquent que l’encadrement débute avant l’entrée au doctorat. En ce sens, une discussion préalable entre la personne directrice et la personne doctorante est souhaitable afin de dégager une vision commune du projet et des responsabilités individuelles qui y sont associées.

« Dans le cadre de notre recherche, nous avons constaté que certaines facultés proposent un contrat, soit un document formel, où plusieurs de ces sujets sont abordés. Cette première étape d’un long parcours se présente comme un moment clé pour la poursuite des études aux cycles supérieurs et, potentiellement, pour favoriser la persévérance au doctorat. »(Denis et Lison, 2023, §19)

En ce qui concerne la communication, les chercheuses rappellent que la littérature scientifique montre que « la communication est mentionnée comme déterminant d’une relation d’encadrement fonctionnelle, notamment en ce qui a trait à la dimension relationnelle » (§27). Denis et Lison ajoutent que la communication doit être ouverte, transparente et efficace :

« Pour établir une bonne communication, le doctorant et le directeur de recherche ont intérêt à disposer d’un espace relationnel privilégié qui fait sens pour eux. Ils doivent pouvoir se faire confiance, en particulier pour traiter des questions hors de la zone de confort. »(Denis et Lison, 2023, §30)

Enfin, les chercheuses expliquent que l’insertion professionnelle, les objectifs de carrière et les compétences qui y sont associés doivent être pris en compte :

« parmi les éléments à considérer rapidement, il y a l’objectif de carrière et les compétences attendues. Il importe de les distinguer d’un doctorant à l’autre afin, comme le mentionne une directrice de recherche, d’adapter son encadrement à l’objectif de carrière du doctorant et aux compétences à développer pour l’atteindre. »(Denis et Lison, 2023, §37)

Références

Denis, C., et Lison, C. (2023). L’abandon aux études doctorales : Un problème de direction? Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, 39(1). https://doi.org/10.4000/ripes.4499

Déri, C. E., Vincent, C., et Tremblay-Wragg, É. (2023). L’accompagnement par les pairs au doctorat pour socialiser les femmes au métier de chercheuse. Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur, 39(1). https://doi.org/10.4000/ripes.4519

Duchesne, C., Le Callonnec, L., et Gagnon, N. (2023). De doctorants à directeurs de recherche : Accompagnement reçu et dispensé. Revue internationale de pédagogie de l’enseignement supérieur39(1). https://doi.org/10.4000/ripes.4434