Au collégial, la physique est la discipline scientifique la moins appréciée des étudiantes et des étudiants. Est-ce que le choix d’une approche pédagogique axée sur la contextualisation peut améliorer la motivation et la réussite des personnes étudiantes?

La chercheuse Lisa Giachini, enseignante en physique au cégep Édouard-Montpetit, présente les résultats d’une recherche qui s’intéresse aux liens entre la motivation, l’apprentissage et l’utilisation pédagogique de problèmes intéressants et riches en contexte.

Qu’est-ce qui motive les personnes étudiantes en physique?

La valeur accordée aux apprentissages, et donc la motivation à apprendre, est étroitement associée à la perception de l’utilité et à l’intérêt des personnes étudiantes envers la matière. Cette motivation liée à l’intérêt est plus difficile à susciter dans le contexte d’un programme préuniversitaire (comme celui de sciences de la nature) que dans un programme technique, où la dimension vocationnelle est plus évidente.

La chercheuse a donc choisi d’étudier l’impact pédagogique de la contextualisation des problèmes (qui permet de mettre en valeur l’utilité) et du choix des thèmes d’intérêt pour les personnes étudiantes.

Dans le cadre d’un cours collégial de physique mécanique, premier cours de physique obligatoire dans le programme de sciences de la nature, cette recherche vise à répondre aux questions suivantes :

  • Quels sont les impacts de l’utilisation de problèmes riches en contexte (PRC) et de problèmes intéressants et riches en contexte (PIRC) sur l’apprentissage global? L’apprentissage global se décline en quatre dimensions : l’apprentissage conceptuel, l’apprentissage de la résolution de problèmes, le niveau de performance global, et la réussite du cours.
  • Quels sont les liens entre la motivation, l’apprentissage et l’utilisation pédagogique des PRC et PIRC?

Les « problèmes riches en contexte » (PRC) s’appuient sur des « mises en situation hautement contextualisées et profondément ancrées dans la réalité » (p.10-11). Les « problèmes intéressants et riches en contexte » (PIRC), en plus d’être contextualisés, correspondent aux intérêts de la personne étudiante.

Une expérimentation en contexte réel

La recherche s’est déroulée en plusieurs étapes. Une phase préliminaire a permis l’appropriation de l’approche pédagogique par PRC par les deux personnes enseignantes impliquées dans la démarche. Cette phase a également permis de collecter des données qualitatives auprès des personnes étudiantes et enseignantes, en vue d’ajuster le protocole d’expérimentation.

La phase d’expérimentation s’est déployée sur une session de cours, auprès de 4 groupes-classes de physique mécanique (93 personnes étudiantes participantes et deux personnes enseignantes). Cet échantillon a été divisé en deux groupes témoins, qui devaient résoudre des problèmes traditionnels (non contextualisés), et deux groupes expérimentaux, qui devaient résoudre des problèmes contextualisés. Les problèmes de physique sélectionnés dans cette étude ont été puisés dans des répertoires existants, accessibles aux personnes enseignantes. Dans un des deux groupes expérimentaux, les personnes étudiantes pouvaient choisir parmi plusieurs thèmes. Ces personnes avaient donc accès à un problème « intéressant » en plus d’être « utile » (parce que contextualisé). Dans tous les groupes, les problèmes étaient abordés en séances coopératives en plus de faire l’objet de devoirs individuels.

Un impact avéré sur l’apprentissage

Les résultats de cette expérimentation confirment l’hypothèse selon laquelle l’utilisation de PRC et de PIRC, en classe de physique, favorise la motivation et l’apprentissage des étudiantes et des étudiants.

  • Sur les 4 dimensions de l’apprentissage global, le « gain d’apprentissage conceptuel » pour les groupes expérimentaux est cependant le seul significatif. L’autrice avance que l’expérimentation réalisée auprès d’un nombre plus grand de personnes pourrait révéler des résultats plus significatifs pour les autres dimensions de l’apprentissage.
  • Sur le plan de la motivation, un gain a été observé à la fin de la session pour les groupes expérimentaux et une perte pour les groupes témoins. La chercheuse explique que la contextualisation augmente la valeur accordée à l’apprentissage, donc la motivation, et c’est principalement via la variable d’intérêt que la dynamique motivationnelle est stimulée.
  • Une corrélation forte entre la motivation et le gain d’apprentissage conceptuel a été constatée. Parmi les deux variables motivationnelles (utilité et intérêt envers la matière), la variable « intérêt » est la plus corrélée avec le gain d’apprentissage. Cet impact s’est manifesté dans le groupe expérimental qui avait la possibilité de choisir le thème du problème, mais également dans celui qui n’avait pas ce choix, vraisemblablement parce que les thèmes prédéterminés correspondaient aux intérêts des personnes étudiantes.

Une approche porteuse bien au-delà des cours de physique

Les résultats de cette étude, outre ses implications pour l’enseignement de la physique au collégial, présentent un intérêt plus large. La chercheuse souligne notamment que l’utilisation pédagogique des PIRC pourrait renforcer l’approche programme au collégial, un objectif inscrit dans le Plan stratégique 2019-2023 du ministère de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur. Par ailleurs, cette approche basée sur la contextualisation des problèmes est susceptible de favoriser des liens interdisciplinaires. Cette orientation est d’ailleurs favorisée dans le nouveau programme en Sciences de la nature.

Référence 

Giachini, L. (2024). L’utilisation pédagogique de problèmes intéressants et riches en contexte conduit-elle à un gain d’apprentissage pour les collégiens de sciences de la nature? Cégep Édouard-Montpetit. https://eduq.info/xmlui/handle/11515/39424