Les liens entre l’apprentissage et le fonctionnement du cerveau sont un sujet de recherche très en vogue depuis quelques décennies, mais font l’objet de plusieurs croyances erronées dans le grand public.

Une équipe composée de spécialistes européens et québécois dans les domaines de l’éducation et des neurosciences s’intéresse aux mythes entourant la douance dans leur article « Neuromyths and knowledge about intellectual giftedness in a highly educated multilingual country ».

Les impacts des neuromythes sur la réussite étudiante

Un neuromythe est « une idée fausse générée par un malentendu, une lecture erronée ou une citation erronée de faits scientifiquement établis » (traduction libre).

Ces fausses croyances, lorsqu’elles sont véhiculées par les personnes enseignantes, peuvent entraîner des conséquences importantes sur la réussite étudiante. Par exemple, des recherches ont montré que les stéréotypes de genre, comme l’idée que les filles seraient moins douées en mathématiques ou que les garçons seraient moins bons en lecture, affectent négativement la motivation et la performance scolaire. Ces mythes agissent ainsi comme des « prophéties autoréalisatrices ».

Une recherche dans le milieu de l’éducation

S’intéressant plus spécifiquement à la douance, l’équipe de recherche a interrogé un échantillon de 200 personnes considérées comme détenant un bon niveau de connaissances générales sur le fonctionnement du cerveau. Les personnes participantes, résidant au Luxembourg et évoluant dans les milieux de l’éducation, ont été divisées en deux groupes : le premier était composé de personnes enseignantes à différents niveaux scolaires ou étudiantes en sciences de l’éducation (n=152), alors que les personnes dans le deuxième groupe exerçaient un rôle professionnel en éducation ou étaient étudiantes en psychologie (n=48). Au moyen d’un questionnaire en ligne, les personnes participantes devaient se prononcer sur la véracité de 32 énoncés, dont certains étaient des mythes et d’autres des faits vérifiés scientifiquement, concernant le fonctionnement du cerveau en général ou la douance en particulier.

Des mythes toujours tenaces

Il ressort de cette étude deux constats, révélateurs des lacunes relatives à l’identification de la douance :

  • La théorie des intelligences multiples (un neuromythe) est encore très prégnante. Seulement 5,3% des personnes enseignantes et futures enseignantes (groupe 1) participant à l’étude ont relevé ce mythe parmi les énoncés, et une proportion à peine plus élevée (6,3%) a été en mesure de le faire chez les personnes professionnelles ou étudiantes en psychologie (groupe 2).
  • Le critère du niveau de QI comme seul indicateur objectif valide de la douance (un fait scientifique) est peu connu. Cet énoncé a été identifié comme véridique par une petite minorité de personnes répondantes, soit 5,9% des participantes et participants du groupe 1, et 16,7% dans le groupe 2.

D’autres résultats ont attiré l’attention de l’équipe de recherche, notamment les conceptions erronées au sujet de la prévalence accrue de l’anxiété chez les étudiantes et étudiants doués (alors que la recherche tend à démontrer le contraire), un mythe largement partagé dans le milieu de l’éducation.

Pistes d’action

Constatant la persistance des neuromythes en éducation, les auteurs et autrices de l’étude suggèrent notamment de :

  • Poursuivre les recherches pour mieux comprendre et prévenir la circulation des neuromythes;
  • Inclure des cours de neuroscience dans les programmes d’éducation et offrir des ressources documentaires aux personnes professionnelles en exercice;
  • Sensibiliser les milieux sur les conséquences de ces mythes sur les personnes étudiantes douées;
  • Favoriser l’accès aux connaissances au sujet de la douance, notamment par des activités de vulgarisation scientifique.

Référence

Schmitt, A., Wollschläger, R., Blanchette Sarrasin, J., Masson, S., Fischbach, A. et Schiltz, C. (2023). Neuromyths and knowledge about intellectual giftedness in a highly educated multilingual country. Frontiers in Psychology, 14. https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fpsyg.2023.1252239