Des chercheuses de l’Université Carleton soutiennent qu’une stratégie canadienne en éducation à la littératie numérique est nécessaire.

Dans un récent article (en anglais) de la revue Policy Options, publiée par l’Institut de recherche en politiques publiques, les chercheuses Kara Brisson-Boivin et Samantha McAleese rappellent que la pandémie a mis en lumière les obstacles rencontrés par certaines populations pour avoir accès à Internet.

Dans certaines communautés, c’est 30 % des ménages qui disposent d’une connexion avec une vitesse permettant de participer à des cours en ligne. Le fossé numérique n’est toutefois pas seulement géographique : il s’ancre dans des contextes sociaux, économiques et culturels, et recoupe les catégories d’origine, de classe, de genre et d’âge. Selon les chercheuses, ces croisements d’inégalités ne sont pas souvent pris en compte dans les débats sur l’accès au numérique.

Outiller les populations marginalisées

L’organisme canadien à but non lucratif MediaSmart, dans lequel les deux chercheuses sont impliquées, privilégie une analyse intersectionelle des inégalités pour de comprendre l’ampleur du fossé numérique.

Cette approche intersectionnelle reconnaît l’éducation à la littératie numérique comme une composante essentielle d’une future stratégie nationale visant à combler ce fossé.

Alors que les solutions mises de l’avant mettent souvent l’accent sur l’amélioration des infrastructures, les chercheuses soutiennent qu’il ne s’agit là que d’une première étape pour réduire les inégalités numériques. Elles citent à cet égard l’Autorité canadienne pour les enregistrements Internet (ACEI), selon laquelle il convient d’offrir un accès à Internet aux populations, mais aussi les outils et les ressources pour devenir numériquement compétent·es.

Autrement dit, l’accès à Internet et aux appareils est le point de départ du développement des compétences numériques nécessaires à la citoyenneté numérique éthique et à l’autonomie en ligne.

Par exemple, le travail et l’apprentissage en ligne ont des répercussions sur la vie privée des utilisateurs·trices et la protection des informations. Pour comprendre ces répercussions, l’acquisition des compétences en littératie numérique est essentielle.

Le droit à l’éducation… numérique

Selon les chercheuses, la littératie numérique est plus qu’un savoir-faire technologique. Elle comprend diverses pratiques éthiques, sociales et réflexives essentielles pour développer la citoyenneté numérique éthique, qui sont ensuite intégrées dans le travail et l’apprentissage en ligne.

Les approches qui mettent trop l’accent sur les compétences techniques ou technologiques ne tiennent pas toujours compte du fait que l’éducation à la littératie numérique permet de réduire les inégalités sociales et économiques (pour les communautés noires ou les minorités linguistiques, par exemple).

Au XXIe siècle, il s’agit d’un outil nécessaire à l’éducation, à l’emploi et à la participation économique, à l’engagement civique, à l’inclusion sociale, à la sécurité, à l’autonomisation, à la santé et au bien-être. Pour ces raisons, la littératie numérique est un droit fondamental.

Par conséquent, le Canada doit investir à long terme dans une stratégie nationale de littératie numérique. En plus de s’engager à offrir à toutes les populations la large bande à l’échelle nationale d’ici 2030, le Canada doit également s’engager à offrir une formation en littératie numérique qui tient compte des obstacles multiples et croisés auxquels font face les populations marginalisées. La réduction de la fracture numérique par l’éducation permettra ainsi aux différentes populations d’utiliser, de comprendre et de créer avec la technologie, ce qui est au cœur de la citoyenneté numérique du XXIe siècle.

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