L’Institut national de santé publique (INSPQ) offre une synthèse des connaissances sur les effets de l’utilisation des écrans en contexte scolaire sur la cognition des jeunes de moins de 25 ans.

Les principaux constats découlant de cette synthèse montrent que « les appareils numériques en classe, utilisés à des fins personnelles ou pédagogiques, au mieux n’apportent aucun bénéfice à l’apprentissage, et au pire entraînent un effet négatif sur la cognition des jeunes. » (p.32)

Mieux comprendre les effets des écrans sur l’apprentissage

Cette synthèse repose sur deux recensions d’articles parus entre 2017 et 2022 et portant sur ces thèmes :

  • La distraction numérique (la présence et l’utilisation d’appareils numériques en classe à des fins personnelles) et ses effets sur la cognition
  • Les effets de la lecture et de l’écriture numérique en classe sur la cognition, en les comparant à la lecture et l’écriture papier

Distraction numérique

Pour ce volet, dix articles présentant 12 études ont été analysés.

Multitâche et apprentissage

Des 12 études, 7 portaient sur le multitâche numérique, soit, « le fait d’utiliser un appareil numérique individuel à des fins personnelles pendant un cours ou durant la réalisation d’une tâche cognitive (p. ex. : écouter le cours donné par l’enseignant tout en textant) » (p.9).

Leurs conclusions révèlent que :

  • La performance à un questionnaire de mémorisation et de compréhension réalisé à la suite d’une présentation pédagogique est plus faible lorsqu’une activité de multitâche numérique a été réalisée simultanément.
  • Les personnes assises à proximité de quelqu’un qui navigue sur Internet ou sur les réseaux sociaux performent également moins à ce type de questionnaire.   

Les effets du cellulaire en classe

Les 5 autres études portaient sur l’attention, la mémoire de travail et le raisonnement non verbal en présence du cellulaire. Elles montrent que :

  • Les groupes soumis à une distraction numérique performent moins bien aux tests de mémoire de travail et de raisonnement non verbal. Les résultats aux tests d’attention sont cependant similaires entre les groupes avec ou sans distraction.
  • Des études ont mesuré une diminution de performance aux tests de raisonnement non verbal en présence du cellulaire, même si celui-ci n’était pas activement utilisé (ex. placé sur le bureau, éteint ou écran caché). Le simple fait de voir l’appareil suffirait à provoquer des pensées intrusives.

Ces résultats indiquent que le multitâche numérique nuit à l’apprentissage. Cela apparait cohérent avec la littérature sur le multitâche non-numérique qui a déjà montré que « faire deux tâches cognitives en même temps se fait au détriment de la vitesse et de l’exactitude. » (Koch et al., 2018 dans Tremblay et Laforest, 2023, p.26)

Les autrices du rapport rappellent par ailleurs que l’utilisation d’appareils numériques individuels en classe n’est pas reliée aux activités d’apprentissage. Ainsi, les « ressources cognitives engagées entrent en compétition pour atteindre deux objectifs incompatibles (pédagogique et personnel). » (p.27)

Écriture et lecture numérique

Ce deuxième volet de l’étude présente la synthèse de 7 méta-analyses, portant principalement sur des étudiants et étudiantes de niveau postsecondaire.

Lecture numérique et compréhension de texte

L’INSPQ a repris les résultats de 6 méta-analyses s’intéressant aux effets de la lecture numérique ou papier sur la compréhension de texte :

  • 4 méta-analyses ont révélé que la compréhension générale du texte est inférieure lorsque le support de lecture est numérique
  • 2 méta-analyses ont plutôt constaté une compréhension similaire entre les deux supports textuels.

La baisse de compréhension des textes numériques s’expliquerait par l’adoption d’une stratégie de lecture superficielle, la difficulté à naviguer à travers le texte numérique et par l’absence de stimulation sensorimotrice liée au toucher.

Prise de note et cognition

L’INSPQ s’est également intéressé aux résultats de 2 méta-analyses portant sur la prise de notes. Dans les deux cas, aucun avantage à la prise de notes de façon numérique n’a été observé.

Les autrices rappellent cependant que des études ont montré que la prise de notes manuscrites, en raison du mouvement de la main, renforce le processus de transformation de l’information dans le but de la retenir.

Ainsi, « l’usage des écrans dans un contexte pédagogique pour lire et prendre des notes n’apporterait aucune valeur ajoutée à la compréhension de texte ou à l’apprentissage. » (p.25) Dans le cas de la lecture, il apparait même que l’usage du numérique nuit à la compréhension de texte.

L’importance de considérer la valeur pédagogique ajoutée

Face à ces résultats, les autrices du rapport rappellent que plusieurs organisations à l’international « préconisent que l’usage des écrans en classe réponde à un objectif pédagogique et apporte une valeur ajoutée, c’est-à-dire un bénéfice additionnel à l’enseignement et aux apprentissages, en comparaison aux méthodes d’enseignement « sans écran ». » (Maryland Department of Health et Maryland State Department of Education, 2019; National Afterschool Association, 2017; The Sedentary Behaviour Research Network, 2022; Virgara et al., 2020; Virginia Department of Education, 2021, dans Tremblay et Laforest, 2023, p.30)

Cette précaution est particulièrement importante dans le contexte où le numérique se taille une place importante à tous les niveaux d’enseignement.

Référence

Tremblay, T. et Laforest, J. (2023). L’utilisation des écrans en contexte scolaire et la santé des jeunes de moins de 25 ans : effets sur la cognition. Institut national de santé publique du Québec [INSPQ]. https://www.inspq.qc.ca/es/node/659591