Selon les résultats d’une récente étude américaine, l’utilisation d’alertes par les personnes enseignantes pour signaler des comportements à risque chez les étudiantes et étudiants pourrait réduire les abandons.

Ces conclusions sont tirées d’une étude ayant comparé les résultats scolaires ainsi que les taux d’abandon d’étudiantes et d’étudiants selon l’utilisation ou non d’un système d’alerte par le personnel enseignant.

Des alertes comme stratégie préventive

Les établissements d’enseignement américains sont nombreux à avoir adopté des systèmes permettant aux personnes enseignantes de signaler les étudiantes et les étudiants présentant des risques d’obtenir des résultats insuffisants ou d’abonner à un cours.

L’instauration de ces systèmes d’alerte vise à offrir du soutien ciblé aux étudiantes et étudiants jugés à risque d’abandon, mais également à susciter des interactions positives entre les personnes qui étudient et différents membres du personnel qui les soutiennent à la suite des signalements.

L’équipe de recherche mobilise différents modèles théoriques pour justifier la pertinence des systèmes d’alerte :

  • le modèle de Tinto (1993) qui souligne le rôle critique des interactions formelles et informelles avec le personnel enseignant et professionnel.
  • les travaux de Hoffman (2014) qui mettent l’accent sur l’importance des interactions positives entre le personnes étudiantes et enseignantes, tant pour améliorer les résultats scolaires que pour favoriser l’intégration académique.
  • Le concept de « momentum académique » (Attewell, Heil, et Reisel, 2012 ; Martin et al., 2013 ; Wang, 2017) qui repose sur l’idée que des facteurs internes (ex. motivation, compétences étudiantes) et externes (ex. soutien institutionnel ou familial) présents au début du parcours d’études peuvent en renforcer, en ralentir ou en détourner la progression.

Une comparaison de l’utilisation ou de la non-utilisation d’alertes

L’étude a été menée dans une université américaine utilisant depuis une dizaine d’années un système informatisé d’alerte dont l’utilisation par le personnel enseignant est optionnelle.

Le système d’alerte prévoit que la personne enseignante peut signaler ses préoccupations envers une personne étudiante en lien avec :

  • Un manque ou un arrêt de la participation
  • Des absences répétées
  • Une qualité insuffisante du travail
  • La non-remise de travaux
  • Une situation d’échec inévitable, malgré des évaluations restantes

Une fois l’alerte soumise, un courriel est envoyé à la personne étudiante et à une personne responsable de lui offrir du soutien.

L’équipe de recherche a souhaité savoir si l’utilisation d’un système d’alerte avait un impact positif sur les résultats des étudiantes et des étudiants. Pour ce faire, elle a analysé les données de 6716 personnes inscrites dans 18 cours de différentes disciplines. De ce nombre, 3702 étaient inscrites dans des cours où le système d’alerte n’était pas utilisé, comparativement à 3014, inscrites dans les mêmes cours, mais offerts par des personnes enseignantes qui utilisaient les alertes. L’équipe a comparé ces étudiantes et étudiants sur la base :

  • De leur taux de désistement au cours
  • De leur moyenne générale obtenue dans le cours
  • Du pourcentage de personnes ayant obtenu une note de « C » ou plus.

Des analyses statistiques ont permis de regrouper les profils d’étudiantes et étudiants selon différentes caractéristiques similaires (ex. genre, âge, soutien financier, note moyenne au secondaire) afin d’isoler les effets des alertes d’autres caractéristiques étudiantes.

Les alertes… efficaces, mais à contextualiser avec l’ensemble des pratiques enseignantes

Les résultats ont montré que les personnes étudiantes dans les cours utilisant des alertes avaient :

  • de plus faibles taux de désistement au cours
  • des moyennes générales supérieures
  • une probabilité accrue d’avoir une note de « C » ou plus

Pour l’équipe de recherche, ces résultats confirment que les alertes constituent une stratégie d’intervention précoce prometteuse. Cependant, elle reconnait que les personnes enseignantes qui utilisent les alertes pourraient aussi être plus susceptibles d’adopter de meilleures pratiques pédagogiques, de porter une attention accrue à leurs étudiantes et étudiants ou de connaître les ressources offertes par leur établissement pour soutenir les personnes étudiantes. L’ensemble de ces éléments, et non seulement les alertes, pourrait donc expliquer les meilleurs résultats obtenus par les personnes étudiantes dans leurs cours. Ainsi, des études additionnelles devraient se pencher sur les pratiques enseignantes dans leur ensemble et la façon dont les systèmes d’alerte y sont intégrées, de même que sur les effets des alertes sur les personnes étudiantes qui les reçoivent.

Référence

Han, K., Meints, K., Burns, L. et Loper, K. (2025). Instructor use of academic alerts and its impact on student outcomes: controlling for selection bias. Studies in Higher Education. https://doi.org/10.1080/03075079.2024.2440552