Le logement constitue la plus grosse dépense dans le budget de la population étudiante (UTILE, 2022a). Au Québec, la majorité des étudiants et étudiantes locataires (64 %) consacre plus de 30 % de leurs revenus mensuels — incluant les prêts et bourses ainsi que l’aide parentale — aux dépenses liées à l’habitation (ibid.). 

Figure 3.
Une maison contient trois silhouettes côte-à-côte dont deux sont colorées en corail. Le tiers de la maison est coloré en turquoise. Il y est écrit : Près de 2 personnes étudiantes sur 3 consacrent plus de 30 % de leurs revenus à l’habitation.

Taux d’effort

Rapport entre le revenu mensuel (incluant le salaire, l’aide parentale et les prêts et bourses) et les dépenses liées au logement (UTILE, 2022a).  

Un taux d’effort égal ou supérieur à 30 % est révélateur d’une précarité résidentielle importante (ibid.). 

Figure 4.
Le taux d’effort est représenté sous forme d’équation mathématique. Le taux d’effort égale les dépenses liées au logement divisé par le revenu mensuel multiplié par 100.

Les effets du stress financier sur la réussite 

Une situation financière précaire serait l’une des sources de stress les plus importantes pour la population étudiante (Newcomb-Anjo et al., 2017; Villatte et al., 2017). En effet, il s’agit d’un des facteurs de risque les plus importants pour prédire l’augmentation des symptômes dépressifs chez la population étudiante, de même que son bien-être psychologique (Richardson et al., 2017; Stallman, 2010; UEQ, 2019). 

Figure 5.
Une spirale sur laquelle se trouve cinq icônes. La première est une maison avec le symbole de dollar à l’intérieur avec l’énoncé Crise du logement abordable en-dessous. La deuxième est une tirelire en forme de cochon qui est cassée en deux avec l’énoncé Stress financier en-dessous. La troisième est une tête vue de profil avec une ligne entortillée au-dessus avec l’énoncé Hausse des symptômes dépressifs en-dessous. La quatrième est une forme d’arrêt stop avec une paume de main ouverte à l’intérieur avec l’énoncé Frein à la poursuite des études en-dessous. La dernière, au centre de la spirale est un triangle avec un point d’exclamation à l’intérieur avec l’énoncé Menace à l’accessibilité aux études supérieures en-dessous. Des flèches partent de chacun des icônes et pointent vers l’icône du centre, soit Menace à l’accessibilité financière aux études.

En plus de ses effets sur la santé mentale, le stress financier peut avoir une incidence sur le cheminement universitaire, notamment le fait de poursuivre ou non des études aux cycles supérieurs (CUSC/CCREU, 2021). Près de la moitié des étudiants et étudiantes affirment que les enjeux financiers ont un impact négatif sur leurs études futures et près du quart dit que la précarité financière les décourage de poursuivre tout autre projet d’études (ibid.). 

La crise du logement abordable 

Le stress financier découle en partie de la crise du logement qui sévit dans plusieurs villes québécoises et canadiennes et qui touche de plein fouet la population étudiante (UTILE, 2023). Plusieurs habitent une résidence sur le campus, mais 60 % vit dans des logements privés à l’extérieur de celui-ci (UEQ, 2020). Le manque de logements abordables à proximité des établissements d’enseignement supérieur fait en sorte que la population étudiante loue des appartements dont les prix de location sont au-delà de leur capacité à payer (UTILE, 2022b).  

Le prix des logements privés avec un fort « taux de rotation » de locataires — c’est-à-dire où les déménagements y sont fréquents (chez la population étudiante, par exemple) — a augmenté en moyenne de 18 % entre 2021 et 2022 (SCHL, 2023). Or, près des deux tiers des personnes étudiantes qui sont locataires ont un revenu inférieur à 20 000 $ par année (ibid.).

Cette crise du logement abordable — qui concerne autant les grandes villes que les régions — exacerbe la précarité financière étudiante (UEQ, 2020), augmente l’endettement étudiant et menace l’accessibilité aux études supérieures (UTILE, 2022b). 

Une recherche interne de McMaster University en Ontario révèle que les personnes étudiantes de première année habitant en résidence auraient davantage de chances de poursuivre leurs études et d’obtenir leur diplôme que celles vivant en dehors du campus (McMaster University, s. d.). Les étudiantes et les étudiants internationaux habitant en résidence auraient davantage de chances (6,5 %) d’obtenir leur diplôme que leurs homologues vivant hors campus (ibid.).  

Des initiatives pour favoriser un logement étudiant abordable

  • L’Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant (UTILE) met sur pied des projets de logement étudiant à but non lucratif (dont des coopératives) et adapté à la vie étudiante, avec un accès Internet inclus, des studios semi-meublés, plusieurs chambres dans un même logement avec la collaboration de partenaires socialement responsables (le Fonds immobilier de solidarité FTQ, par exemple).
  • La construction de logements au-dessus de nouveaux pavillons universitaires (Bula, 2022).
  • L’achat d’hôtels à reconvertir en logements étudiants abordables ou d’immeubles à bureaux peu occupés avec l’arrivée du télétravail.
  • La cohabitation intergénérationnelle, où des personnes étudiantes vivent avec des personnes âgées en résidence ou qui disposent d’espace dans leur maison (McGowan, 2022).
  • La mise en place et l’élargissement de programmes d’hébergement en famille d’accueil pour la population étudiante internationale (Shen, 2019).
  • Un répertoire de logements disponibles dans la région pour regrouper toutes les offres à un seul endroit afin de (1) faciliter la recherche pour la population étudiante et (2) centraliser l’offre d’espaces locatifs par les locateurs (Cégep de Rivière-du-Loup, 2023).
  • L’initiative Passe-moi ton bail, qui permet aux locataires de laisser une copie de leur bail aux nouvelles personnes lors d’un déménagement, afin de réduire les hausses abusives menant à la crise du logement.
  • L’offre de résidences destinées à certaines populations étudiantes, notamment autochtones (Cégep de Sept-Îles, 2021; Western University, 2023). 

La vulnérabilité de certains groupes de la population étudiante  

Malgré les lois en vigueur, les logements du marché privé peuvent être inabordables ou insalubres, et les personnes étudiantes qui y vivent peuvent être à risque d’abus (Brunet, 2022; Mohamed, 2022). Certains groupes de la population étudiante sont plus vulnérables : à titre d’exemple, le prix moyen d’un logement habité par des membres d’une minorité visible est plus élevé (UTILE, 2019). 

Si la population étudiante internationale a doublé entre 2015 et 2020, et même triplé depuis 2008 dans certaines provinces canadiennes (Bula, 2022), cette hausse ne s’est pas accompagnée d’un investissement proportionnel dans le logement étudiant. Bon nombre de ces étudiantes et étudiants se sont installés dans des villes déjà touchées par une crise du logement (ibid.).  

Obtenir un logement convenable peut être particulièrement difficile pour les personnes étudiantes qui n’ont pas de réseaux sociaux bien établis, qui rencontrent des barrières linguistiques et ont de faibles revenus (Mohamed, 2022). Les propriétaires demandent souvent des références ou des garanties de revenu, qui sont particulièrement difficiles à obtenir dans leur situation (Bula, 2022).  

Avant la pandémie et l’inflation, la population étudiante internationale rencontrait déjà des obstacles de taille pour se trouver un logement convenable (Calder et al., 2016). La crise du logement abordable a donc exacerbé leur précarité résidentielle déjà existante. 

Figure 6.
Une maison est représentée avec le tiers supérieur en turquoise et les deux-tiers inférieurs en lilas, une ligne horizontale séparant les deux parties. À côté de la partie turquoise on lit Population étudiante locale : 14,3 % prévoient habiter seul ou en colocation lors de leurs études collégiales. Dans la partie turquoise de la maison on lit Hausse du prix des loyers et Pénurie de logements abordables/étudiants près des campus. À côté de la partie lilas on lit Population étudiante internationale : 62,5 % prévoient habiter seul ou en colocation lors de leurs études collégiales. Dans la partie lilas de la maison on lit Barrières linguistiques, Propriétaire demande des références/garanties, Logements en moins bon état et Prix des loyers plus élevés.

Pistes d’action pour favoriser un logement étudiant abordable  

Pour les services à la vie étudiante 

  • S’associer à des organismes de droits des locataires pour offrir à la population étudiante (notamment internationale) de l’information sur le logement au Québec : le fonctionnement des baux, la négociation entre les propriétaires et les colocataires, les recours en cas de litige, etc. (Brunet, 2022; FECQ, 2021). 
  • Faire connaître à la population étudiante des initiatives de réduction des hausses abusives de loyers (Passe-moi ton bail, par exemple). 
  • Créer des répertoires d’offres locales de logement, en collaboration avec les autorités municipales et régionales. 
  • Tenir compte, lors d’interventions individuelles ou de groupe, du stress lié à la précarité résidentielle, notamment auprès de la population étudiante vulnérable.  

Pour les directions et les gestionnaires d’établissements  

  • Poursuivre le dialogue avec les gouvernements municipal, provincial et fédéral pour mettre en place une stratégie structurante de financement de logement social étudiant (UEQ, 2020), principalement de nouvelles résidences étudiantes (UTILE, 2022b). 
  • Favoriser la création de partenariats pour la construction de logements étudiants abordables avec des partenaires à but non lucratif (Mowreader, 2023b). 
  • Plaider pour l’exemption de taxes foncières accordée pour la construction des résidences pour les cégeps en plus des universités, notamment en région. 
  • Encourager un meilleur dialogue entre les services de recrutement international et les services à la vie étudiante afin d’arrimer les stratégies de recrutement aux réalités du marché local du logement (Brunet, 2022). 

Pour le ministère de l’Enseignement supérieur  

  • Considérer les coûts réels des loyers, entre autres, en ciblant un taux d’effort plutôt qu’un montant d’aide fixe (UEQ, 2020). 
  • Augmenter de manière significative les dépenses admises liées au logement dans l’aide financière aux études. 

Références

Brunet, T. A. (2022, 22 décembre). Universities and colleges want to enrol more students. But where are they supposed to live? The Conversation. http://theconversation.com/universities-and-colleges-want-to-enrol-more-students-but-where-are-they-supposed-to-live-195624 

Bula, F. (2022, 9 mars). Juguler la crise du logement étudiant. Affaires universitaires. https://www.affairesuniversitaires.ca/articles-de-fond/article/juguler-la-crise-du-logement-etudiant/ 

Calder, M. J., Richter, M. S., Mao, Y., Burns, K. K., Mogale, R. S. et Danko, M. (2016). International Students Attending Canadian Universities: Their Experiences with Housing, Finances, and Other Issues. Canadian Journal of Higher Education / Revue canadienne d’enseignement supérieur, 46(2), 92‑110. https://doi.org/10.47678/cjhe.v46i2.184585 

Cégep de Rivière-du-Loup. (2023, 13 mars). Hébergement : un répertoire en vue de faciliter la recherche pour la communauté étudiante. Cégep de Rivière-du-Loup. https://www.cegeprdl.ca/nouvelles/2022-2023/mars-2023/hebergement-un-repertoire-en-vue-de-faciliter-la-recherche-pour-la-communaute-etudiante/?p=5 

Cégep de Sept-Îles. (2021, 25 août). Un concept innovateur d’hébergement pour étudiants autochtones. https://cegepsi.ca/un-concept-innovateur-dhebergement-pour-etudiants-autochtones/ 

CUSC‐CCREU. (2021). Enquête de 2021 auprès des étudiants de dernière année. Canadian University Survey Consortium/Consortium canadien de recherche sur les étudiants universitaires. https://cusc-ccreu.ca/?page_id=207&lang=fr 

FECQ. (2021). Mémoire sur le logement étudiant. Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ). https://docs.fecq.org/FECQ/M%C3%A9moires%20et%20avis/2021-2022/Memoire-logement-etudiant_112eCo_Zoom.pdf 

McGowan, S. (2022, 13 septembre). With rentals scarce, a program that houses students with seniors is growing fast. University Affairs. https://www.universityaffairs.ca/news/news-article/with-rentals-scarce-a-program-that-houses-students-with-seniors-is-growing-fast/ 

McMaster University. (s. d.). The Value of Living in Residence. https://housing.mcmaster.ca/future-residents/value-of-residence/ 

Mohamed, A. (2022, 11 octobre). My impossible journey to find student housing in Toronto. Maclean’s. https://www.macleans.ca/society/finding-student-housing-in-toronto-seemed-impossible-getting-scammed-didnt-help/ 

Mowreader, A. (2023, 24 avril). Long-standing nonprofit offers discounted student housing. Inside Higher Ed. https://www.insidehighered.com/news/student-success/college-experience/2023/04/24/long-standing-nonprofit-offers-discounted?mc_cid=836cd8e789&mc_eid=44020fe8ee 

Newcomb-Anjo, S. E., Villemaire-Krajden, R., Takefman, K. et Barker, E. T. (2017). The Unique Associations of Academic Experiences With Depressive Symptoms in Emerging Adulthood. Emerging Adulthood, 5(1), 75‑80. https://doi.org/10.1177%2F2167696816657233 

Richardson, T., Elliott, P., Roberts, R. et Jansen, M. (2017). A Longitudinal Study of Financial Difficulties and Mental Health in a National Sample of British Undergraduate Students. Community Mental Health Journal, 53(3), 344‑352. https://doi.org/10.1007/s10597-016-0052-0 

SCHL. (2023). Rapport sur le marché locatif. Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). https://www.cmhc-schl.gc.ca/fr/professionnels/marche-du-logement-donnees-et-recherche/marches-de-lhabitation/rapports-sur-le-marche-locatif 

Shen, A. (2019, 21 août). Un deuxième chez-soi. Affaires universitaires. https://www.affairesuniversitaires.ca/articles-de-fond/article/un-deuxieme-chez-soi/ 

Stallman, H. M. (2010). Psychological distress in university students: A comparison with general population data. Australian Psychologist, 45(4), 249‑257. https://doi.org/10.1080/00050067.2010.482109 

UEQ. (2019). Enquête «Sous ta façade»: enquête panquébécoise sur la santé psychologique étudiante. Union étudiante du Québec (UEQ). 

UEQ. (2020). Avis sur le logement étudiant. Union étudiante du Québec (UEQ).

UTILE. (2019). Le logement étudiant au collégial. Résultats de l’enquête PHARE 2019. Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant (UTILE). https://uploads-ssl.webflow.com/604e1456a8cd2bab84c72bc8/610ab258043a2ea817a80f80_UTILE-Rapport-PHARE-2019.pdf

UTILE. (2022a). Le logement étudiant au Québec. Unité de travail pour l’implantation de logement étudiant (UTILE). https://uploads-ssl.webflow.com/604e1456a8cd2bab84c72bc8/62e2db9eec481f4aa84c8390_Rapport-PHARE-2021_20220728.pdf 

UTILE. (2022b, 22 septembre). Rentrée universitaire | L’enquête PHARE révèle une situation alarmante pour le logement étudiant au Canada. Nouvelles de l’UTILE. https://www.utile.org/nouvelles/phare-2021-canada 

UTILE. (2023, 27 janvier). Rapport sur le marché locatif 2022 – Crise du logement étudiant: le pire est toujours devant nous. https://www.newswire.ca/fr/news-releases/rapport-sur-le-marche-locatif-2022-crise-du-logement-etudiant-le-pire-est-toujours-devant-nous-848980936.html 

Vachon, I., Bikie Bi Nguema, N. et Gaudreault, M. (2023). Enquête sur la réussite à l’enseignement collégial, à partir des données du SPEC 1 2021: rapport de recherche spécifique portant sur les étudiantes et les étudiants internationaux. ÉCOBES – Recherche et transfert; CRISPESH; IRIPII. https://ecobes.cegepjonquiere.ca/media/tinymce/EnqueteReussite_Rapport_EI_2023-02.pdf 

Villatte, A., Marcotte, D. et Potvin, A. (2017). Correlates of Depression in First-Year College Students. Canadian Journal of Higher Education / Revue canadienne d’enseignement supérieur, 47(1), 114‑136. https://doi.org/10.47678/cjhe.v47i1.186429 

Western University. (2023). Ayukwanktiyóhake’ Student Residence. Indigenous Student Centre. https://indigenous.uwo.ca/students//future-students/ayukwanktiyohake.html