Les jeunes ayant connu des épisodes d’itinérance ou qui ont été placés dans des foyers d’accueil sont peu nombreux à accéder aux études supérieures. Pour ceux et celles qui entrent au collège, la précarité financière et résidentielle constituent des obstacles majeurs à la poursuite de leurs études.

Comment les jeunes ayant connu l’instabilité résidentielle ou l’itinérance durant leur adolescence vivent-ils la transition aux études supérieures ? Quels sont leurs besoins en matière de logement ? Ce sont les questions auxquelles a voulu répondre une équipe de recherche de l’Université de Géorgie, dans l’article « Nowhere to go: Housing pathways of college students with foster care and homelessness experience ». 

L’équipe s’est intéressé aux parcours de 27 étudiantes et étudiants inscrits dans un programme collégial d’une durée de 4 ans. Ces jeunes adultes avaient tous connu une forme ou une autre de précarité résidentielle durant leur adolescence. Le protocole de recherche comprenait 3 entretiens au cours d’une année académique, et les personnes participantes étaient incitées à remplir un journal de bord de façon continue.

Les parcours de précarité résidentielle chez les jeunes

Les chercheuses et les chercheurs ont identifié 3 types d’instabilité résidentielle chez les adolescentes et adolescents. Ces profils se combinent souvent dans les histoires de vie, marquées par de multiples « traumatismes liés à l’expérience de la pauvreté, des déplacements forcés, du décès ou de la maladie d’un parent, de l’abandon ou du rejet » (traduction libre, p.104).

  • Itinérance en contexte familial : Aux États-Unis, ce phénomène en croissance touche particulièrement les familles monoparentales et afrodescendantes. Cette forme d’instabilité résidentielle découle souvent d’une éviction ou d’une saisie, ce qui amène les familles à devoir cohabiter chez des amis ou des parents, à vivre temporairement dans des hôtels ou des refuges. Dans la recherche, 9 personnes participantes ont connu ce type de précarité durant leurs études secondaires.
  • Itinérance isolée : Des difficultés familiales ou une situation conflictuelle ou abusive sont souvent à l’origine d’une rupture familiale. Ces jeunes désaffiliés fréquentent peu les ressources d’hébergement, et dorment souvent dans la rue, dans leur voiture ou chez des connaissances. Treize personnes de l’échantillon ont connu cette réalité.
  • Placement en foyer d’accueil : Les jeunes retirés de leur milieu familial d’origine connaissent en général de multiples placements au cours de leur adolescence. Souvent, ils et elles ont vécu des épisodes d’instabilité résidentielle avant leur placement. Cinq personnes participantes à la recherche ont eu ce type de parcours.

Transitions aux études supérieures : le soutien financier fait la différence

L’équipe de recherche a constaté qu’une fois entrés au collège, les jeunes adultes connaissent des trajectoires résidentielles différenciées. Alors que certains voient leur situation se stabiliser (16 personnes), d’autres continuent à subir une importante précarité résidentielle (11 personnes).

Vivre en résidence sur le campus apporte une stabilité aux étudiantes et étudiants, surtout pour celles et ceux qui bénéficient de programmes de soutien financier dédiés aux jeunes issus de foyers d’accueil. En revanche, plusieurs jeunes doivent travailler un grand nombre d’heures, parfois à plein temps, ce qui met leur réussite scolaire à risque. Les personnes participantes ont aussi indiqué que la fermeture des résidences au cours de l’été, et par conséquent l’obligation de trouver une autre option pour se loger, est une grande source de stress, particulièrement au moment des examens, à la fin de la session. Les chercheurs et chercheuses notent aussi que la stabilité résidentielle reste fragile pour ces jeunes, qui ne peuvent bénéficier d’un soutien financier familial et doivent affronter l’augmentation du coût de la vie. Cette insécurité génère beaucoup d’anxiété chez ces étudiantes et étudiants vulnérables.

Les solutions pour faciliter les transitions

Ces constats ont amené l’équipe de recherche à formuler certaines recommandations à l’endroit des décideurs et décideuses :

  • Réduire le fardeau financier des études : Un soutien financier particulier pourrait être mis en place pour les jeunes adultes qui ont connu une trajectoire d’instabilité résidentielle durant leur adolescence.
  • Mettre en place des services de soutien spécifiques afin de faciliter la transition aux études supérieures de ces étudiantes et étudiants vulnérables, en continuité avec les mesures existantes au niveau secondaire.
  • Créer des programmes d’aide au logement dédiés aux étudiantes et étudiants vulnérables, une population qui est mal desservie par les mesures existantes.

Référence

Skobba, K., Moorman, D., Meyers, D., White, K. et Tiller, L. (2023). Nowhere to go: Housing pathways of college students with foster care and homelessness experience. Child & Family Social Work, 28(1), 96‑107. https://doi.org/10.1111/cfs.12944