Que signifie, pour une personne adulte, être adéquatement préparée à entreprendre un retour aux études supérieures ? Et, inversement, qu’est-ce qui détermine la bonne préparation d’une ou d’un professeur à enseigner à des adultes ?

Une équipe de l’Université Franklin, en Ohio, s’est intéressée aux perceptions des adultes inscrits dans un programme universitaire de premier cycle et à celles de leurs enseignants et enseignantes. Leur article présente les résultats de leur démarche de recherche et les pistes d’action qui en découlent.

Une population étudiante plus à risque

Les adultes qui effectuent un retour aux études supérieures sont plus à risque d’échouer un cours d’introduction dans leur programme que les jeunes en formation initiale, particulièrement s’il s’agit d’étudiantes et étudiants de première génération universitaire, à faible revenu ou appartenant à un groupe minoritaire.

L’équipe de recherche a voulu mieux comprendre ce qui détermine le degré de préparation aux études ou à l’enseignement aux adultes, en croisant les perspectives des personnes apprenantes et enseignantes.

Pour y arriver, des entrevues individuelles et de groupe ont été réalisées auprès de 11 membres du personnel enseignant et de 19 étudiantes et étudiants inscrits à un cours d’introduction dans les domaines de la comptabilité, de l’administration, de l’anglais, de la finance, de la gestion ou des mathématiques. L’université où s’est déroulée cette étude offre des cours en ligne partout aux États-Unis, principalement à des personnes apprenantes adultes qui effectuent un retour aux études.

Le point de vue des personnes enseignantes

Les enseignantes et enseignants ayant participé à la recherche croient que leur bagage académique, leurs activités de développement professionnel et leurs diverses expériences d’enseignement les ont bien préparés à enseigner à des adultes. Elles et ils ont déclaré adapter leur enseignement pour qu’il soit plus flexible et mieux connecté aux réalités de la « vraie vie ».

Les personnes enseignantes estiment aussi que le soutien institutionnel (en lien avec la technologie, le design pédagogique ou encore le partage entre pairs) les aide à améliorer leur enseignement.

Enfin, elles considèrent qu’elles arrivent à construire une relation positive avec les personnes apprenantes, mais que certains étudiants et étudiantes n’ont pas les acquis académiques de base pour réussir en enseignement supérieur.

Le point de vue des personnes apprenantes

De leur côté, les personnes apprenante ayant participé à la recherche considèrent que leur motivation et leur expérience constituent une bonne préparation pour réussir les cours d’introduction de leur programme (sauf pour les cours de mathématiques). Elles apprécient les exercices pratiques, de même que la structure des cours et l’utilisation des outils technologiques, lorsque celle-ci est encadrée et cohérente d’un cours à l’autre.

Elles croient néanmoins que les enseignants et enseignantes devraient mieux prendre en compte le parcours de vie des adultes et adapter leur approche en conséquence.

Des écarts de perception qui nuisent à la réussite éducative

L’analyse des entrevues met en lumière des écarts de perception entre personnes enseignantes et apprenantes concernant les déterminants d’une préparation adéquate soit à enseigner, soit à apprendre.

  • Alors que les personnes enseignantes soulignent la pertinence de leurs différentes expériences d’enseignement, les personnes apprenantes sont plus enclines à croire qu’enseigner à des adultes constitue une compétence spécifique qui ne peut s’acquérir en enseignant à des jeunes.
  • Alors que les personnes enseignantes soulignent l’importance des connaissances académiques préalables, les adultes qui retournent aux études croient surtout que ce sont leurs expériences de travail et de vie qui les préparent adéquatement à leur retour aux études.

Ces écarts de perception peuvent avoir un impact négatif sur la motivation des personnes apprenantes, sur leur confiance et même sur leur attitude à l’égard de l’apprentissage. Par ailleurs, l’analyse des entretiens a révélé l’importance du soutien institutionnel dans les parcours de réussite, un soutien qui est déterminant tant du point de vue des personnes enseignantes qu’apprenantes.

Des recommandations pour les établissements d’enseignement supérieur

Les résultats de cette étude qualitative amènent l’équipe de recherche à formuler six recommandations pour favoriser la réussite des adultes en enseignement supérieur :

  1. Favoriser une culture institutionnelle qui valorise le fait de chercher de l’aide et le développement professionnel ;
  2. Intégrer les perspectives des adultes apprenants dans la conception des cours ;
  3. Offrir aux personnes apprenantes moins préparées des opportunités de développer leurs capacités, notamment via des microcertifications ;
  4. Prendre en compte les circonstances de vie et les attitudes à l’égard de l’apprentissage au moment de l’inscription ;
  5. Favoriser la collaboration entre les personnes enseignantes et les conseillers et conseillères pédagogiques pour accompagner les adultes en reprise d’études ;
  6. Offrir du soutien institutionnel pour réduire les barrières technologiques tant pour les personnes enseignantes qu’apprenantes.

Référence

Wanstreet, C. E., Bennett, P. A. et Sweetland, Y. (2024). Readiness to Teach and Learn in College: Faculty and Adult Learner Perspectives. The Journal of Continuing Higher Education, 1‑16. https://doi.org/10.1080/07377363.2024.2312601