C’est en 2007 que l’initiative Savoir Affaires est née, en tant que démarche de diversification économique régionale visant à offrir aux étudiant·es des cycles supérieurs et aux postdoctorant·es une occasion de développer leurs compétences grâce à une expérience avec le milieu des affaires — généralement peu enclin à recourir à des étudiant·es hautement qualifié·es pour innover — et à soutenir les régions dans leur défi de maintenir une économie diversifiée.
Pour citer cet article
CAPRES (2021). L’initiative Savoir Affaires : une immersion entrepreneuriale et régionale.
https://oresquebec.ca/pratiques-inspirantes/linitiative-savoir-affaires-une-immersion-entrepreneuriale-et-regionale-pratique-inspirante/Certains projets déployés par les établissements d’enseignement supérieur visent le développement d’une culture entrepreneuriale et de nouvelles compétences chez les étudiant·es, contribuant ainsi à favoriser leur transition vers le marché du travail et leur insertion socioprofessionnelle.
C’est le cas de Savoir Affaires de l’Université du Québec, une initiative de mobilisation et de concertation régionale entre des partenaires provenant des milieux académique, économique et des affaires.
Deschesnes, 2020a, p. 10
La démarche de Savoir Affaires, qui s’étale sur plusieurs mois, débouche sur une semaine intensive d’activités portant sur des thématiques choisies par les acteur·trices de la région d’accueil dans le cadre d’une compétition entrepreneuriale basée sur le jumelage d’une cinquantaine d’étudiant·es des cycles supérieurs et d’une soixantaine de gens d’affaires (ibid.).
Ce jumelage vise à créer de nouvelles idées d’affaires avec le soutien des intervenant·es socioéconomiques régionaux. Les personnes intéressées par les projets issus de l’événement peuvent ensuite bénéficier d’un accompagnement en démarrage d’entreprise (ibid.).
L’initiative Savoir Affaires se distingue des autres projets en entrepreneuriat en étant au service d’une région et de ses enjeux de même que par sa semaine intensive, son caractère ambulant, son envergure et la mobilisation des milieux académique, économique et des affaires (Deschesnes, 2020a, p. 7).
Mettre à profit les savoirs des doctorant·es dans les régions du Québec
Le projet est né d’une volonté de la haute direction de l’Université du Québec[1] d’impliquer les étudiant·es de 3e cycle des établissements du réseau[2] dans le développement régional. Dans cette mouvance, deux projets ont retenu l’attention de la vice-présidence à l’enseignement et à la recherche en 2005 : Les Doctoriales françaises, en France, et Contacts Affaires, au Québec. Le premier offrait aux doctorant·es l’occasion de prendre conscience des compétences professionnelles acquises au cours de leur formation et d’être en contact avec le monde des affaires, en vue de faciliter ultérieurement leur insertion professionnelle. Le deuxième projet, qui s’adressait aux gens d’affaires de chacune des régions du Québec, visait à leur offrir une occasion de créer de nouveaux liens et de découvrir des outils utiles au développement de leur entreprise.
Entre 2007 et 2009, les grandes lignes d’un projet pilote furent présentées à d’éventuels partenaires régionaux. Le premier événement Savoir Affaires s’est tenu en Mauricie, en 2011, en partenariat avec l’Université du Québec à Trois-Rivières et la Société d’aide au développement des collectivités Centre-de-la-Mauricie. Huit éditions de Savoir Affaires, en collaboration avec six établissements hôtes du réseau de l’Université du Québec, ont permis depuis à 1700 personnes d’imaginer 258 projets d’affaires dans dix régions du Québec.
Des retombées pour l’insertion socioprofessionnelle
L’évaluation de l’initiative Savoir Affaires réalisée récemment (Deschesnes, 2020b) a permis de faire des constats qui reposent sur une analyse et des croisements de données collectées auprès de 2213 personnes, incluant celles provenant d’une enquête menée afin de connaître l’état d’avancement des 258 projets issus des huit éditions de Savoir Affaires auprès des personnes ayant poursuivi le développement d’un projet.
En plus des retombées économiques régionales, l’événement génère des bénéfices pour les étudiant·es participant·es sur le plan de la transition vers le marché du travail, dont les suivants :
1. L’élargissement du réseau de contacts professionnels
Durant la semaine de l’événement, les étudiant·es et les gens d’affaires tissent des liens entre eux de même qu’avec les intervenant·es économiques régionaux.
Selon l’évaluation de l’initiative, les interactions et la collaboration entre les milieux académique et économique persistent après cette semaine intensive (Deschesnes, 2020a).
2. La bonification des compétences et du désir d’entreprendre
Les étudiant·es interrogé·es dans le cadre de l’évaluation de l’initiative affirment avoir amélioré leurs compétences à percevoir les besoins du milieu, à travailler en équipe et à élaborer des plans d’affaires.
De plus, leur désir d’entreprendre et d’innover a augmenté : près du tiers d’entre eux ont eu envie de s’inscrire à un cours ou à une formation en entrepreneuriat, et presque la moitié ont manifesté le désir de participer à d’autres activités à caractère entrepreneurial. Par exemple, après leur participation à Savoir Affaires, des étudiant·es sondé·es ont démarré une nouvelle entreprise, ont fait une demande de brevet ou ont repris une entreprise existante, les domaines d’activités allant du tourisme au génie civil, à l’informatique et aux technologies numériques, en passant par l’agroalimentaire, les biocomposites et l’intelligence d’affaires.
3. L’augmentation du désir de réaliser un stage
L’envie des étudiant·es interrogé·es de réaliser un stage dans une entreprise ou dans un organisme du milieu a légèrement augmenté après avoir participé à Savoir Affaires, passant de 58,4 % à 66,2 %.
4. La précision de leur rôle dans la société
La moitié des étudiant·es interrogé·es ont eu l’impression d’avoir contribué à un niveau élevé ou très élevé au développement de la région d’accueil.
Environ 62 % des étudiant·es sondé·es sont d’avis que leur participation à Savoir Affaires leur a beaucoup ou assez permis de mieux réaliser le rôle qu’ils pourraient jouer dans la société avec leur formation universitaire.
5. Le changement d’objectifs
La participation à Savoir Affaires aurait inspiré près de 17 % des étudiant·es interrogé·es à apporter des changements à leurs objectifs ou à leur thème de recherche. À titre d’illustrations, un étudiant a mentionné avoir réaligné ses objectifs de carrière « vers une possibilité plus grande d’entreprendre »; un autre a décidé d’envisager « l’axe entrepreneurial en plus de l’axe universitaire »; un autre a décidé de passer à l’action en fondant son propre cabinet (Deschenes, 2020b). Voici le témoignage d’une étudiante :
« Mes objectifs sont plus audacieux. Je voulais juste compléter mon DESS [diplôme d’études supérieures spécialisées] et aujourd’hui, je me suis inscrite à la maîtrise et je rêve de développer un leadership d’expertise en évaluation des besoins pour mieux impacter l’administration dans mon pays ».
citée dans Deschenes, 2020b, p. 44
6. L’envie d’aller ou de vivre en région
Près du quart des étudiant·es qui ont répondu au sondage mené dans le cadre des travaux d’évaluation à titre d’ancien·nes participant·es de Savoir Affaires seraient retourné·es dans les régions hôtes après leur participation, soit pour des vacances, pour le travail ou pour faire de la recherche sur le terrain.
Deux personnes ont migré en région pour s’y installer et faire leur vie personnelle et professionnelle : une nouvelle arrivante au Québec a mentionné avoir découvert « un monde à part » (le milieu des affaires et de l’innovation) qui l’aurait motivée à continuer de vivre au Québec.
Ces exemples montrent que les échanges et la collaboration entre les étudiant·es et les écosystèmes régionaux du milieu des affaires pendant l’événement Savoir Affaires peuvent déboucher sur des occasions d’insertion socioprofessionnelle pour les futur·es diplômé·es.
[1] Impliquée depuis la conception et la création de l’initiative Savoir Affaires, l’entreprise Frappier Tandem+ est représentée par Lorraine Frappier, qui est copropriétaire, avec l’Université du Québec, du concept Savoir Affaires.
[2] Le réseau de l’Université du Québec comprend 10 universités, écoles et institut présents dans différentes régions du Québec.
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