Aux États-Unis, malgré la présence accrue de personnes plus âgées à l’université, la lutte contre l’âgisme est peu intégrée dans les actions visant à favoriser l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI) dans les établissements d’enseignement supérieur.  

C’est ce que révèle l’article Age as a Factor in Diversity, Equity, and Inclusion Initiatives in Higher Education signé par des chercheuses de l’Université Washington à Saint-Louis.

L’âgisme : un phénomène mondial

L’âgisme « renvoie aux stéréotypes (mode de pensée), aux préjugés (sentiments) et à la discrimination (comportement) à l’égard de personnes en raison de leur âge. » (Organisation mondiale de la santé [OMS], 2021). Il s’agit d’un phénomène largement répandu : l’OMS rapporte qu’en Europe, une personne sur trois a été victime d’âgisme. Aux États-Unis, une étude a mis en lumière le fait que plus de 80 % des personnes âgées vivent de l’âgisme au quotidien.

Alors que les étudiants et étudiantes d’âges variés se côtoient de plus en plus fréquemment dans les universités, les chercheuses ont souhaité mieux comprendre dans quelle mesure l’âge était pris en considération dans les efforts en matière d’EDI. Leur recherche visait à :

  • Savoir si le personnel impliqué dans les initiatives d’EDI considérait l’âge comme facteur de diversité
  • Documenter les stratégies employées pour agir sur l’âgisme

Les chercheuses ont rencontré 42 personnes travaillant en EDI dans 36 établissements d’enseignement supérieur aux États-Unis. Les résultats présentés sont issus de l’analyse des propos tenus lors de six groupes de discussion et de quatre entretiens individuels.

L’âge : un facteur de diversité, mais pas une priorité d’action

Bien que les personnes interrogées reconnaissent que l’âge est un facteur de diversité et que l’âgisme touche toutes les tranches d’âge, elles ne le considèrent pas comme un enjeu prioritaire. Elles observent également que les questions liées à l’âge sont peu abordées, tant entre leurs collègues en EDI que dans les événements qui leurs sont destinés.

Pour les participants et participantes, diverses raisons expliquent cette situation :

  • Au sein de leurs institutions, la discrimination fondée sur l’âge est davantage vue comme un enjeu légal que comme un enjeu d’inclusion.
  • De façon générale, les problèmes liés à l’âgisme sont perçus comme étant moins importants que d’autres (ex. racisme, homophobie, transphobie, capacitisme, xénophobie). Ils ne sont donc pas priorisés, surtout dans un contexte où il manque de personnel dans les bureaux EDI.
  • La dimension identitaire de l’âge est difficile à saisir : son caractère est changeant et les impacts du vieillissement ne sont pas les mêmes pour tout le monde.

Pour les participants et participantes, l’âge n’est pas un élément isolé dans l’identité d’un individu. Des recherches montrent d’ailleurs que « l’âgisme interagit avec le sexisme, le racisme et le capacitisme et vient exacerber les inégalités » (Dannefer, 2003 dans Morrow-Howell et al. 2024, p.14 [traduction libre]).

Une piste pour inclure des actions contre l’âgisme aux initiatives en EDI serait donc de le faire dans une perspective intersectionnelle.

Quelques pistes d’action pour lutter contre l’âgisme

Bien que la lutte contre l’âgisme ne s’inscrive pas formellement dans les actions du personnel en EDI, les groupes de discussion ont fait ressortir quelques actions déjà en place :

  • Des programmes de transition ou des services d’orientation destinés aux étudiantes et étudiants plus âgés.
  • Des outils destinés au personnel des ressources humaines pour réduire les biais à l’embauche.
  • Des activités pour favoriser le dialogue entre les générations (ex. formations sur les jeunes générations pour les membres du personnel, ateliers pour les étudiantes et étudiants en vue d’intégrer des milieux de travail multigénérationnels).

Des actions sont également suggérées par les personnes participantes pour une meilleure sensibilisation aux préjugés liés à l’âge :

  • Organiser des conversations intergénérationnelles sur le campus, en portant une attention particulière à l’intersectionnalité.
  • Mettre en place des comités consultatifs pour lutter contre l’âgisme.
  • Investir davantage en recherche sur la discrimination fondée sur l’âge.
  • Obtenir un engagement institutionnel à lutter contre l’âgisme.

Références

Organisation mondiale de la Santé. (2021). Rapport mondial sur l’âgisme : résumé d’orientation. https://www.who.int/fr/teams/social-determinants-of-health/demographic-change-and-healthy-ageing/combatting-ageism/global-report-on-ageism

Morrow-Howell, N., Dinman, M., Mauk, S. et Galucia, N. (2024). Age as a Factor in Diversity, Equity, and Inclusion Initiatives in Higher Education. Journal of Gerontological Social Work, 1‑17. https://doi.org/10.1080/01634372.2024.2326691